Préface

 

L’Assemblée spirituelle nationale des Bahá’ís de France fut la seule à reconnaître et accepter le second Gardien de la Foi Bahá’íe en mai 1960. Pourquoi cela? Pour bien comprendre les raisons de cette décision, il est essentiel pour le lecteur de se familiariser, jusqu’à un certain degré, avec le fait que tous les Bahá’ís croient que l’ordre administratif Bahá’í est basé sur le Testament divinement conçu du Maître `Abdu’l-Bahá, fils du Fondateur de la Foi Bahá’íe, Bahá’u’lláh. Un document décrit par Shoghi Effendi, premier Gardien de la Foi, comme « l’Héritier de celui qui fut à la fois l’Auteur (Bahá’u’lláh) et de l’Interprète (`Abdu’l-Bahá) de la loi de Dieu », ayant été conçu « par ces relations mystiques entre Celui qui transmit l’influence génératrice de Son Plan Divin et Celui qui en fut le propagateur et le dépositaire choisi » et, par conséquent, le saint et immortel « Enfant du Covenant », un Covenant conçu par Bahá’u’lláh avec ceux qui acceptèrent sa Cause en considérant `Abdu’l-Bahá, comme l’écrit Shoghi Effendi: « d’abord comme le Centre et l’Axe de l’incomparable Covenant universel de Bahá’u’lláh, et encore comme son oeuvre la plus exaltée, le miroir immaculé de ses enseignements, l’infaillible Interprète de Sa Parole… ».  « Telle est la solidité de ce pacte que depuis l’origine des temps jusqu’à l’époque actuelle aucune dispensation religieuse n’en a produit de semblable » affirme catégoriquement `Abdu’l-Bahá.

Tout Bahá’í reconnaît `Abdu’l-Bahá comme étant « l’Architecte accompli » d’un ordre administratif Bahá’í divinement conçu par Son Testament, un Document décrit par Shoghi Effendi comme faisant partie du texte formellement divin. En écrivant au sujet de cet ordre divin légué à tous par `Abdu’l-Bahá, Shoghi Effendi nous montre que la « Structure administrative puissante » désignée par `Abdu’l-Bahá dans Son Testament est soutenue par « deux piliers », les institutions du gardiennat et de la « Maison universelle de justice », lesquelles sont considérées comme des « institutions inséparables » et comme les « deux organes fondamentaux » de son Testament, « divins par leur origine, essentiels dans leurs fonctions et complémentaires dans leurs buts et desseins. »

Selon les stipulations du Testament de `Abdu’l-Bahá, le Gardien de la Foi est désigné comme le « Centre de la Cause », le seul interprète de la parole de Dieu révélée par Bahá’u’lláh, et la « tête sacrée » de la Maison universelle de justice, l’institution législative suprême de l’ordre administratif. Shoghi Effendi, en écrivant au sujet des fonctions du Gardien comme la « tête sacrée » de cette institution, a insisté fortement sur le fait que le Gardien, dans cette capacité, n’est pas une figure mais fournit « une direction nécessaire afin de définir l’ensemble de l’acte législatif et ses représentants élus » et, dans sa capacité de seul interprète de la parole de Dieu telle que révélée par Bahá’u’lláh, « est tenu d’insister pour leur faire reconsidérer tout décret qu’il pense, en toute conscience, entrer en conflit avec le sens et s’éloigner de l’esprit des paroles révélées par Bahá’u’lláh. » Les stipulations du Testament expliquent que la succession du gardiennat se fait de façon ininterrompue, chaque Gardien étant désigné par son prédécesseur, tel que le démontre la citation suivante du Testament écrit par le Centre du Covenant: « de son vivant » (et non par document testamentaire).

Pendant les sept dernières années des trente-six de son ministère débutant en 1921 après l’ascension de `Abdu’l-Bahá, Shoghi Effendi décida que la situation au Centre mondial de la Foi était devenu favorable et que le développement de la Foi était arrivé à un stade où il pouvait « enfin » ériger les institutions internationales de la Foi en tenant compte du facteur significatif, parmi d’autres, « de l’actuelle maturité vigoureuse des neuf institutions nationales administratives fonctionnant à travers le monde Bahá’í. » La première « institution internationale embryonnaire » qu’il produisit fut la Maison universelle de justice qu’il établit par décret en janvier 1951 et qu’il qualifia dans ce stade embryonnaire initial comme le Conseil international Bahá’í. Il désigna Mason Remey, un Bahá’í américain, président de ce conseil, ce croyant ayant accepté la Foi au tournant du siècle et dont les services rendus pour la Foi furent sans pareil, ayant inclus dans ses efforts l’enseignement de la Foi Bahá’íe dans de nombreux pays. Ses fruits comptent plusieurs livres sur la Foi ainsi que des accomplissements architecturaux remarquables pour la Foi. Il fut l’architecte de trois temples Bahá’ís déjà construits, ainsi que deux autres à construire (l’architecte choisi par `Abdu’l-Bahá pour celui à être construit au Mont Carmel et choisi par Shoghi Effendi pour celui de Tihrán) ainsi que l’édifice majestueux des Archives internationales construit au Mont Carmel.

À plusieurs reprises, `Abdu’l-Bahá lui rendit hommage dans ses ouvrages parus dans les publications STAR OF THE WEST pour la pureté de ses motifs et sa fidélité exemplaire au Covenant de Bahá’u’lláh, et fut exclusivement promit par Lui dans l’un de ses ouvrages: « avant peu, ton Seigneur te fera le symbole de direction pour l’humanité. »

Indiquant l’importance et de la signification de l’établissement du Conseil international Bahá’í au Centre mondial de la Foi, Shoghi Effendi délivra la seule proclamation de son ministère le 9 janvier 1951 (par télégramme). Il y employa des termes superlatifs et élogieux sans précédent pour proclamer « cette décision historique marquant un point significatif et sans pareil dans l’évolution de l’ordre administratif de la Foi de Bahá’u’lláh durant les trente dernières années » (c’est à dire après l’ascension de `Abdu’l-Bahá, le moment de la naissance de l’ordre administratif et son accession au gardiennat). Ensuite, plus d’attention fut accordée à l’extrême importance à la formation du Conseil international lorqu’il annonça dans sa proclamation:

« Accueille, avec le coeur reconnaissant et plein d’allégresse, finalement, la constitution du Conseil international auquel l’histoire proclamera comme l’événement le plus grand, répandant l’éclat sur la deuxième époque de l’âge formatif de la dispensation Bahá’íe, sans égal dans les entreprises conçues depuis la naissance de l’ordre administratif de la Foi au lendemain de l’ascension de `Abdu’l-Bahá, occupant un rang secondaire seulement aux événements immortels et glorieux associés avec les ministères des trois Figures centrales de la Foi. »

Au début, durant ce stade embryonnaire dans le développement du Conseil international, Shoghi Effendi assigna des fonctions importantes et spécifiques au Conseil, lesquelles furent restreintes aux fonctions affectant les relations de la Foi avec « les autorités du nouvel État d’Israël. » D’une manière significative, comme l’expliquent les écrits de Mason Remey, Shoghi Effendi n’ordonna jamais de convoquer le Conseil, cette « institution naissante », comme corps fonctionnel durant le restant de son ministère. À la place, Shoghi Effendi choisit d’assigner des tâches individuelles aux membres du Conseil. Il désigna Rúhíyyih Khánum (membre du Conseil) comme « liaison choisie » entre lui et le Conseil afin d’éviter toute implication de sa part d’assumer la présidence du Conseil. Malgré cela, on doit s’apercevoir que personne, y compris Mason Remey, à ce moment précis, ne put discerner la signification de sa nomination comme président de cette Maison universelle de justice embryonnaire, une nomination tenant la clef vers la continuation du gardiennat, car selon les clauses du Testament de `Abdu’l-Bahá, seul le Gardien de la Foi préside comme « tête sacrée » de cette institution. Par conséquent, la mettre en activité durant le vivant de Shoghi Effendi aurait nécessité la destitution de Mason Remey de son rôle présidentiel et d'assumer la présidence lui-même. L’investigateur peut se demander pour quelles raisons Shoghi Effendi choisit de nommer son successeur « de son vivant » d’une manière si indirecte avec comme résultat d’obscurcir cette nomination aux yeux des croyants actuels et futurs? La réponse, non perçue par qui que ce soit à ce moment précis, ni après son ascension, fut évidente seulement après l’acquisition de la proclamation de Mason Remey.  En désignant Mason Remey président du Conseil international, un homme, son aîné de vingt-trois ans, et lorsque ce corps serait activé, assumerait automatiquement le gardiennat de la Foi, Shoghi Effendi, alors âgé de 54 ans, avait clairement indiqué que son ministère prenait fin car il prévu son décès précoce destiné à prendre place sept années plus tard, une éventualité qui aurait dévasté la communauté Bahá’íe mondiale, aurait paralysé et même fait reculer l’accomplissement des buts formidables établis pour les croyants par Shoghi Effendi dans leur poursuite de la croisade mondiale de Dix Ans.

Shoghi Effendi compléta l’établissement de la fondation des institutions supérieures internationales de l’ordre administratif presque une année après avoir fondé le Conseil international lorsqu’il nomma le premier contingent de douze Mains de la Cause en décembre 1951, avec des contingents futurs totalisant vingt-sept désignées plus tard. Ces Mains, qui, en accord avec le Testament de `Abdu’l-Bahá, « sont sous la directive du Gardien de la Cause de Dieu » et qui ont comme « obligations » de « diffuser le parfum divin, d’encourager l’étude, d’améliorer le caractère des hommes et d’être, en toutes circonstances, purifié et détaché des choses terrestres », n’ont donc aucun pouvoir exécutif. Shoghi Effendi confirma l’achèvement de son ouvrage par la fondation de ces plus hautes institutions de l’ordre administratif Bahá’í par télégramme, daté le 30 juin 1952, avec ces paroles:

« Au Centre mondial de la Foi, où, enfin, le mécanisme de ses institutions les plus importantes a été établi, et autour des Tombeaux les plus sacrés, les organes suprêmes de son ordre en éclosion se déploient dans leur forme embryonnaire. »

Vers la fin de son ministère, il restait pour Shoghi Effendi à lancer en 1953, la « croisade mondiale de Dix Ans », dans laquelle il assigna des buts spécifiques pour chaque assemblée nationale Bahá’íe dans le monde et se terminant pour l’anniversaire de la déclaration de Bahá’u’lláh en 1963 dans les jardins de Ridván, Baghdád. Cette croisade avait pour objectif la réalisation des buts des Tablettes du Plan Divin rédigées des années auparavant par `Abdu’l-Bahá dans lesquelles il demande aux croyants de planter la bannière de la Foi dans chaque recoin du monde.

À mi-chemin de cette croisade, en novembre 1957, celle-ci ayant atteint un succès important et des victoires significatives enregistrées dans tous les continents du globe, le monde Bahá’í fut ébranlé en apprenant l’épouvantable et choquante nouvelle de la mort subite de Shoghi Effendi pendant une visite à Londres, en Angleterre. Bien que le Testament de `Abdu’l-Bahá exige que le Gardien de la Foi désigne son successeur « de son vivant », les Bahá’ís du monde entier étaient universellement ignorants qu’il avait déjà accompli ce devoir, car les Mains de la Cause et tous les Bahá’ís avaient perdu de vue cette disposition dans le Testament, ignorance mise en évidence par une proclamation étonnante que les « Mains de la Cause » annoncèrent au monde Bahá’í. Dans la consternation et le chagrin enveloppant les croyants après la mort de Shoghi Effendi et dans l’absence apparente d’un successeur vers lequel les croyants pouvaient se tourner pour se guider, on peut pardonner les croyants qui se tournèrent vers la veuve de Shoghi Effendi, Rúhíyyih Khánum, celle-ci ayant servi comme sa secrétaire pendant plusieurs années et qui fut nommée par Shoghi Effendi Main de la Cause.

Vingt-six autres Mains de la Cause furent nommées, le dernier contingent comptant huit Mains. Shoghi Effendi les ayant désigné dans son dernier télégramme un mois avant sa mort au monde Bahá’í (daté octobre 1957) comme les « Serviteurs principaux » de la fédération mondiale embryonnaire de Bahá’u’lláh, elles prirent possession de cette appellation et interprétèrent celle-ci comme leur donnant le pouvoir suprême dans la Foi. Toutefois, le Testament de `Abdu’l-Bahá n’a jamais accordé cette autorité et ces Mains contredisaient même Shoghi Effendi dans ce même télégramme qui soulignait leurs fonctions et attirait leur attention sur leur rôle de « Serviteurs principaux » dans des termes spécifiques et différents, citant les obligations que leur a octroyées `Abdu’l-Bahá, lorsqu’il mentionna qu’ils « sont investis par la Plume infaillible du Centre du Covenant avec les fonctions doubles de protéger et de propager la Foi de Son Père. »

Shoghi Effendi décéda le 4 novembre 1957. Le 25 novembre, les Mains de la Cause composèrent une proclamation informant les croyants du monde que « Neuf jours ne s’étant point écoulés après l’enterrement » de Shoghi Effendi lorsque les Mains de la Cause au nombre de vingt-six s’assemblèrent au Centre mondial de la Foi « dans notre capacité de Serviteurs principaux de la fédération mondiale embryonnaire de Bahá’u’lláh afin de conférer ensemble sur la situation des plus tragiques faisant face aux Bahá’ís depuis l’ascension de `Abdu’l-Bahá ». Ils donnèrent un compte rendu le 18 novembre dans ce premier conclave des Mains de la Cause que neuf de leurs membres (parmi eux) avaient soigneusement examiné les contenus du bureau et du coffre-fort de Shoghi Effendi et « il fut certifié que Shoghi Effendi n’avait laissé aucun héritier, » une conclusion, si l’on consulte les stipulations du Testament citées ci-dessus, était, pour le moins que l’on puisse dire, faite en grande hâte et sans justification légitime. Si, préalablement, le Testament de `Abdu’l-Bahá avait été révisé et le passage cité auparavant scruté, ce que les Mains oublièrent de faire, qui exige que le Gardien nomme son successeur « de son vivant », les démarches pour trouver un testament écrit par Shoghi Effendi n’auraient pas eu lieu, et elles auraient réalisé que le fait qu’il n’y avait pas de testament ne constituait pas une raison valable pour déduire qu’il était incapable de nommer un successeur, ainsi qu’elles l’écrivirent dans leur proclamation qu’elles envoyèrent au monde Bahá’í par la suite.

Étonnamment, elles justifièrent le fait que Shoghi Effendi ne pouvait faire de Testament en citant: « aucun successeur à Shoghi Effendi ne pouvait être désigné par lui » car « les Aghsán (Branches) une et toutes sont ou décédés ou furent déclarés en violation du Covenant par le Gardien », une interprétation fausse des termes du Testament de `Abdu’l-Bahá qui ne place aucune restriction sur le choix du Gardien en succession à l’Aghsán (étant défini par Shoghi Effendi seulement comme les fils de Bahá’u’lláh et non un terme désignant Ses autres parents proches masculins). En effet, ce Document immuable explique que si le fils aîné du Gardien « n’héritait pas de l’élément spirituel qui est en lui (le Gardien), alors il (le Gardien de la Cause de Dieu) doit choisir une autre branche pour lui succéder. »

Ayant conclu à la hâte que Shoghi Effendi n’avait pas nommé de successeur et ignorant totalement les nombreux énoncés décrit dans ses ouvrages et télégrammes envoyés aux Bahá’ís du monde promettant la continuation de l’existence de l’institution du gardiennat pour des siècles à venir durant la dispensation de Bahá’u’lláh, ainsi que l’importance mise sur le caractère essentiel de cette institution de l’ordre mondial de Bahá’u’lláh, les Mains de la Cause, peu soucieuses que Shoghi Effendi avait déjà établi la Maison universelle de justice embryonnaire qui attendait son activation comme l’institution suprême législative de la Foi qui, au moment approprié, exercerait la juridiction administrative sur les institutions nationales administratives (i.e. initialement les assemblées spirituelles nationales pour atteindre, par la suite, leur stade final de développement avec les maisons nationales de justice), décidèrent de substituer une organisation eux-mêmes au lieu des institutions divinement conçues décrites par `Abdu’l-Bahá dans son Testament. Malgré qu’il soit difficile de croire à ces événements, ils nommèrent un corps de neuf Mains de leurs propres rangs contrairement aux dispositions du Testament de `Abdu’l-Bahá et leur donnèrent le titre de « Régisseurs de la Foi Bahá’íe » ayant leur siège à Haïfa, et, selon leur déclaration, «  seraient devenus les successeurs du Gardien de la Foi Bahá’íe » et, selon ce qu’ils écrivirent, auraient les droits d’exercer «  les fonctions, les droits et les pouvoirs du Gardien de la Foi Bahá’íe. »

Shoghi Effendi ayant demandé à Mason Remey de résider en permanence à Haïfa en 1950 afin de s’occuper entre autre, d’être l’architecte sur le Mont Carmel du magnifique bâtiment désigné à tenir les Archives internationales et, par conséquent, l’être désigné par Shoghi Effendi en 1951 comme président du Conseil international Bahá’í avec son siège à Haïfa, il fut tout naturellement inclus dans le corps des neuf Régisseurs de la Foi Bahá’íe nommé par les Mains. Cependant, il n’accepta jamais l’opinion de ses membres-mains que le gardiennat était à tout jamais terminé, ainsi qu’il en témoigne dans son journal personnel intitulé Observations quotidiennes dans lequel il mentionne aux Mains à plusieurs reprises sa conviction de reconsidérer leur position sur la mise à l’écart du gardiennat. Sa position fut très claire que les Mains, en déclarant l’institution du gardiennat terminée, avaient répudié la disposition majeure du Testament sacré de `Abdu’l-Bahá et avaient ainsi désavoué presque totalement les écrits de Shoghi Effendi concernant la genèse divine de l’ordre administratif Bahá’í.

Lorsque ses efforts s’avérèrent vains avec les refus continuels des Mains de considérer la continuation du gardiennat, cela étant une violation incroyable du Covenant de Bahá’u’lláh, il décida de quitter Haïfa et de regagner sa demeure aux États-Unis pour les raisons soulignées dans sa déclaration:

« Je dois quitter Haïfa, et à travers une correspondance des plus privée et confidentielle avec les Mains de la Foi, ici en Terre Sainte, je les prie de reconsidérer leur action d’administrer la Foi Bahá’íe sans Gardien, et les prie de réexaminer le Testament ainsi que les paroles et les enseignements du bien-aimé premier Gardien de la Foi, Shoghi Effendi, et de réaliser par toutes ces sources, chacun par lui-même, que le gardiennat doit continuer. »

Dans un de ses écrits à ses Membres-Mains, Mason Remey lance cet appel dans le second conclave des Mains à Haïfa en 1958 reflétant son regret et sa déception de ne pouvoir amener les Mains à reconsidérer leur position obstinée vis-à-vis la continuation du gardiennat:

« Souvenez-vous de ma requête faite en votre présence à Bahjí lors de votre réunion dans le second conclave des Mains de la Cause de la Foi en novembre 1958, ma requête au sujet de la sécurité et protection de notre Foi, que l’Office du gardiennat de notre Foi soit voulue par nous tous. Cette suggestion sollicitée par moi, et moi seul, devant le conclave fut rejetée par vingt-quatre des vingt-cinq membres présents se déclarant fermement opposés contre ma requête urgente. »

Des croyants avaient critiqué Mason Remey pour avoir attendu Ridván 1960 (du 21 avril au 2 mai) pour faire parvenir sa proclamation comme deuxième Gardien de la Foi. Ils n’avaient pas reconnu que ce fut seulement une très courte période avant sa proclamation lors de son retour aux États-Unis à bord du paquebot que, pour la première fois, il s’aperçut de la signification et le rapport entre la présidence du Conseil international Bahá’í et le gardiennat. C’est seulement à ce moment-là qu’il réalisa qu’en tant que désigné (nommé) à la tête de ce Conseil, la Maison universelle de justice embryonnaire, un corps retenu inactif depuis sa création et pendant le ministère des dernières années de Shoghi Effendi qui attendait sa mise au monde comme institution active seulement après son décès et sur qui seul le Gardien présiderait comme « tête sacrée », il fut, comme tête embryonnaire de cette institution, second Gardien à venir,  simultanément en attente de sa naissance, dans le poste de gardiennat. Avec cette réalisation, étant le premier et le seul au début à comprendre le rapprochement établi par Shoghi Effendi, cela fut la raison pour laquelle il ne s’était pas auparavant proclamé comme deuxième Gardien de la Foi, ni aux Mains en personne en tant que membre du corps des Régisseurs à Haïfa ou au corps entier des Mains pendant leurs conclaves, et encore moins aux croyants en général.

Durant cet intermède entre le décès de Shoghi Effendi et la publication de la proclamation de Mason Remey, les Régisseurs à Haïfa, acceptés mondialement dans la communauté Bahá’íe comme «  corps suprême de la Cause, » une désignation erronée, ce corps transitoire n’ayant aucun droit d’exister selon les stipulations du Testament de `Abdu’l-Bahá, s’étaient retranchées sous leur autorité illégitime ainsi que leur pouvoir incontesté, quoique leur règne comme Régisseurs ne dura point longtemps car les plans conçus par les Mains, demandant la dissolution de ce corps dans les six années à venir, coïncidèrent avec une élection prématurée d’une Maison universelle privée de Gardien à Ridvan en 1963. Sans égard du fait que sans un Gardien présidant à sa tête elle serait incomplète et faillible, sa confirmation en 1963 serait prématurée et en complet désaccord avec les stages successifs établis pour son développement dans la proclamation de Shoghi Effendi de 1951. En effet, leurs plans mirent complètement de côté le second stade de développement en tant que Tribunal international, et ce, même si Shoghi Effendi a affirmé que ceci était le prélude essentiel à l’institution de la Maison universelle de justice. Cependant, elles lui permirent de fonctionner dans son troisième stade de développement pour une période très courte et donc sans conséquence, avant son élection en 1963 comme la Maison universelle de justice (évidemment, pour les raisons citées ci-dessus, nullement un des buts pour la croisade mise en marche par Shoghi Effendi).

La situation fut telle pour la Foi lorsque Mason Remey fit part de sa proclamation à l’Assemblée spirituelle nationale des Bahá’ís des États-Unis pendant le Ridván de 1960 avec l’espoir que ce corps administratif puisse non seulement le reconnaître comme étant le second Gardien légitime de la Foi, mais aussi, en plein accord avec sa requête, de distribuer sa proclamation aux autres assemblées spirituelles nationales à travers le monde. L’Assemblée spirituelle nationale avait, en même temps, reçu des Régisseurs à Haïfa une annonce très dénonciatrice que ce corps avait aussi fait part aux autres assemblées du monde affirmant que Mason Remey faisait une «demande absurde» d’être reconnu comme Gardien de la Foi et adjurant les «croyants de joindre les Mains en répudiation complète» à ce qu’ils dépeignirent comme son «action aveugle.»

Il ne faut donc pas être surpris, avec ce télégramme reçu des Régisseurs, que l’Assemblée spirituelle nationale ne donna pas la considération impartiale que sa proclamation méritait et le rejeta comme le successeur de Shoghi Effendi. Par conséquent, sa proclamation ne fut jamais distribuée aux croyants des États-Unis, ni aux autres assemblées du monde, avec comme résultat que ces assemblées nationales, avec une exception notable, ainsi que les membres de leur communauté respective, restèrent dans l’ignorance du contenu de sa proclamation. Si les croyants avaient eu l’occasion de la lire par eux-mêmes, sans influence extérieure de leur assemblée ou des Régisseurs, ils auraient pu se baser sur les explications précises présentées donnant des preuves incontestables de son avènement au gardiennat. Ces croyants informés auraient été heureux de savoir que Shoghi Effendi, en accord avec le Testament de `Abdu’l-Bahá, désigna son successeur. Heureusement, l’Assemblée spirituelle nationale des Bahá’ís de France devint une exception, celle-ci ayant reçue directement la proclamation par Mason Remey, et, comme souligné dans le rapport volumineux écrit par son secrétaire, Bernard Fillon, resta ferme et non influencée par l’ordre de le rejeter reçu des Régisseurs. Les membres de l’Assemblée spirituelle nationale des Bahá’ís de France donnèrent leur attention attentive et impartiale à la proclamation de Mason Remey. Par conséquent, ils devinrent la seule assemblée spirituelle nationale dans le monde Bahá’í à reconnaître et accepter avec enthousiasme Mason Remey comme second Gardien de la Foi. L’exposé détaillé de Bernard Fillon rapporte l’histoire déplorable des actions répréhensibles prises et instruites par les Régisseurs, ceux-ci n’ayant aucune autorité d’agir de la sorte sous les clauses du Testament de `Abdu’l-Bahá. Sachant que cette assemblée avait reconnu Mason Remey comme étant second Gardien de la Foi, les Régisseurs forcèrent la dissolution de cette assemblée et l’élection d’un corps illégitime pour le remplacer.

Joel Bray Marangella

Gardien de la Foi Bahá’íe


Traduction anglais-français

par

Christine Marangella

avec l’assistance de Martin Lavallée